Mika Rottenberg : the dark side of contemporary culture

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Mika Rottenberg est une globe-trotteuse : née en Argentine en 76, ses parents émigrent en Israël en 77. Elle étudiera à Hamidrasha en banlieue de Tel Aviv, où elle pose les premières bases de son travail, notamment influencée par son professeur, le vidéaste Guy Ben-Ner. Elle part ensuite aux États-Unis parfaire son éducation à Columbia, New-York.

L'artiste a un univers singulier, et, depuis Dough (2005), les choses n'ont pas vraiment changé, les moyens sont surtout plus importants.

Très remarquée à la Biennale de Venise en 2015 avec son magasin de perles et sa vidéo NoNoseKnows, jouant de l’absurdité et de l’aliénation du monde du travail — collant ainsi parfaitement avec le thème d’Okwui Enwezor «  All the World’s Futures » —, Mika Rottenberg bénéficie jusqu’au mois de septembre d'une exposition solo au Palais de Tokyo. Rencontre.

 

Quelles sont tes sources d’inspiration ?

 

L’inspiration dénote un côté positif, moi je parle plutôt du côté obscur, de l'aspect trash des choses et de la vie, des cultures contemporaines. Ce que je fais c’est plutôt un commentaire visuel, rien à voir avec l’art et son côté esthétique, c’est plutôt lié à des endroits, des espaces négligés abandonnés, et laissés de côté …
 

Tes œuvres vidéos incluent toujours les femmes et la notion de travail avec tout ce qu'elle contient d’absurde.

 

Oui, je fais souvent référence au travail. Il se trouve par ailleurs que les femmes participent au côté performance du monde du travail, qui m'intéresse et avec lequel je joue. Je ne cherche pas à faire de l’art de manière égocentrique, avec un côté moralisateur, mais c’est vrai que mes travaux vidéo ont souvent un lien avec la notion de justice, ce qui renvoie aux femmes — qui sont mises à l’écart dans tous les domaines, y compris dans la sphère industrielle.


 

Ecris-tu tes scenarii ? Comment ça se passe ?

 

Oui j’écris beaucoup de choses, des pages et des pages, et après je ne peux pas me relire !  Ma méthode c’est de faire des dessins, et je fais des photos avec des notes, ça me prend beaucoup de temps, un an au moins pour construire une histoire. Si j'essaye de travailler plus rapidement, le résultat s'en ressent. La pièce présentée à Venise, NoNoseKnows (2015), a été faite rapidement, en un an, avec le montage. J’adore aussi l’énergie du montage et beaucoup d’idées viennent en tournant.
 

 

Tes installations sont-elles séparées de l’univers de tes vidéos ? Ou bien tu les construis en même temps ?

 

Elles sont très différentes, d’abord parce que les installations ne sont pas basées sur le temps. Elles sont enjouées, espiègles, elles font aussi le lien avec les films, en quelque sorte pour contrebalancer.

Ici au Palais de Tokyo, j’ai pu envoyer les plans en trois dimensions, et ils sont pu les exécuter sans souci, car les vrais musées ont l'habitude de travailler à distance. L’exposition est vraiment basée sur une construction architecturale, c’est une invitation pour le  public à errer et jouer dans l’espace, dans les différentes parties, à se laisser surprendre, et taquiner.

La liberté de circulation dans mes expositions est extrêmement importante pour moi, je ne veux enfermer personne, je déteste ça, on sait toujours où est la sortie chez moi !


 

Qu’est-ce que tu veux faire maintenant, tu aimerais t’essayer à quoi d'autre ?

 

Un film, un long métrage, j’ai vraiment envie de cela ; ça ne se fera pas avant plusieurs années, mais j’adore la capacité qu’a le cinéma à capter les masses et à nous envouter, quel formidable outil !


 

Portrait par Anne Maniglier